L'histoire de Steak From Delta commence lorsqu'en 1955, Ricardo Flowers rencontre (dans un bar de Mexico) Oso el Roto (né en 41 à Dallas, fils de Mickaël Rotting, roi du pétrole, et de Samantha Osomovitch, chanteuse de kleizmer/blues) et le Baron Samedi (né en 38 à Honk Hong dans une famille de lords chinois bagarreurs). La discussion est très arrosée, mais Flowers ne semble nullement affecté par les litres de tequila qu'il s'enquille. Rapidement, il convainc les deux lurons de former un groupe pour jouer sa musique révolutionnaire. Guère tenté par le communisme qui lui rappelle sa Chine natale, Samedi se montre d'abord réticent. La réponse de Flowers est restée célèbre: "Non, ce n'est pas de cette révolution là qu'il s'agit. Je vais demander, ou peut-être pas, à une éponge marine d'absorber les effluves d'une belle femme à l'oeil farouche, qui me rappelle très byzarement une douce montagne glacée." (Une version alternative de cette fin de phrase remplace "Montagne glacée" par "Prune de janvier" -thèse soutenue avec ferveur par Umberto Eco devant la CML, mais une autre controverse existe sur cet ultime mot qui aurait été confonu avec "dentier" ou encore "chantier", la prune de chantier figurant selon la théorie de Moondog un avertissement de Flowers à tous les destructeurs potentiels). Selon Sir John Samedi, frère du baron, Flowers aurait intentionnellement prononcé ces derniers mots de façon imprécise, pour rester fidèle à l'ouropo.

Désormais voués corps et âme à la cause de l'Ouropo, Roto et Samedi achetent deux vieilles guitares dans un bazar de Coyoacan et se mettent en quête d'un batteur. Oso, fait alors appel au capitaine Zombie (né en 38 à Bruxelles), batteur hawaïo-belge qui absorbe systématiquement de la poudre vaudou avant de se mettre à jouer.

Les répétitions commencent et les premiers concerts suivent bientôt, notamment à Cherbourg (France) où l'ATAGATO-SRF (Syndicat des Remorqueurs Français) leur donne leur première chance pendant la fameuse tempête du milénaire qui inspirera bien plus tard le film d'Alessandro Jodorowski "Loca Musica Del Agua" (Folle musique des flots, 1977). Par tradition, Steak From Delta continuera à jouer sur ces robustes bateaux pendant les sauvetages de tous les grands pétroliers des années 70. Ainsi, pendant que les Who et Jimi Hendrix se pavanaient à Woodstock, les Steaks se démenaient pour que nos plages ne finissent pas engluées sous le mazout!

Mais ne prenons pas trop d'avance: nous sommes encore dans les années cinquante!Le son de cette première version du steak est tranchant grace à la guitare du Baron et les compos de Flowers sont encore assez Rock'n'Roll. Le colonel Parker, ayant mis la main sur un exemplaire de Dirty Dick qui traînait dans les studios Sun, se serait exclammé "Boy, si on arrive à trouver un chien qui aboie comme ça, je crois que notre fortune est faire!"

En 58 sort un album en collaboration avec The Stars at my Desk (un collectif de moines cajuns qui fabriquaient tous leurs objets eux-mêmes) puis sort l'album Brujari, sur lequel figure le jeune Georges A. Romero aux coeurs. Pour l'anecdote, capitaine Zombi aurait accidentellement laissé se propager sa fameuse poudre au cours d'une répétition, ce qui aurait fortement frappé l'imagination du futur réalisateur de La Nuit Des Morts Vivants (68). Considérant que Roto s'approprie abusivement L'ouropo (il faut dire que Flowers donne peu de nouvelles au début des sixties, peut-être alors perdu dans les Andes) le Baron Samedi quitte le groupe. Oso appelle alors Artémus Crôa (né en 45, quelque part dans le Groënland) un guitariste très mobile sur scène qui donne au steak un côté funky bienvenu (nous sommes en 64 et la musique soul connaît son plein essor). Ils jouent parfois avec Granpamini, frère DJ d'Oso qui manipule frénétiquement ses platines. De temps en temps, el Senor Sexo les rejoint sur scène avec son saxophone ou sa clarinette.